Les Acoustic Research AR3a sont des enceintes provenant de la côte est-américaine. Durant les années 60 et 70, les marques KLH, Acoustic Research et Advent ont contribué à définir le « Boston sound ». Encensées par la critique et adoptées par un grand nombre de professionnels, les AR3a ont connu un succès commercial considérable auprès du public, bien qu'étant particulièrement chères. Succédant aux AR1 et aux AR3, elles ont représenté durant les années 60 et 70 le summum dans la linéarité des basses grâce à la mise en œuvre du principe de la "suspension acoustique". Selon ce principe, un woofer de grande taille dont la fréquence de résonance est très basse est monté dans une enceinte d'un volume relativement réduit de façon à ce que la force de rappel du cône soit principalement assurée par l'élasticité de l'air contenu dans la caisse (ce qui suppose une étanchéité poussée de la caisse).
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La paire d'AR3a a été achetée sur le site d'enchères hollandais (
http://www.marktplaats.nl). Le vendeur m'a assuré que les trois moteurs fonctionnaient, mais que les enceintes ne produisaient plus qu'un faible son quasiment dépourvu de médium et d'aiguës. Ceci laissait supposer que les rhéostats et les condensateurs étaient probablement hors service. La paire d’enceintes était en vente pour une somme modique (300 euros) étant donné le travail à réaliser pour les rénover. Le vendeur m'a très aimablement proposé de me l'apporter à Bruxelles dans le coffre de sa voiture à l'occasion d’un de ses déplacements en Belgique.
La première photo montre une des deux enceintes AR3a devant une B&W DM2 (au fond, contre le mur) et à gauche d’une Celestion Ditton 44. L'ébénisterie de l’AR3a est en rosewood. Le tissu brun de la grille n'est pas la toile d'origine. Ce dernier était toujours constitué d’une toile de lin écrue provenant d'Irlande.
Pour la remise en état des AR3a, nous nous sommes basés sur le guide de réparation très complet mis en ligne sur le site The Classic Speaker Pages (Restoring the AR-3a - The Classic Speaker Pages). Pour les réparations, les pièces de rechange et les divers matériaux ont tous été achetés sur eBay.
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Une fois la grille enlevée, nous constatons qu’il s’agit de la première génération d’AR3a, avec le woofer à aimant ALNICO (le cobalt était encore abordable à l’époque) à suspension en toile enduite de latex, anneau caoutchouté pour la réduction des réflexions et saladier en aluminium coulé. L’année de fabrication est donc inférieure à 1969, date à laquelle le renchérissement du cobalt dû à l’effondrement de la production au Katanga a fait que les constructeurs ont commencé à les substituer par des aimants permanents en céramique. L’anneau en caoutchouc est craquelé, mais cela ne semble pas poser de problème. Les médiums en dôme hémisphérique en polyphénol ainsi que les tweeters en soie, également hémisphériques, sont d’origine. Les numéros de série sont H3A 001222 et H3A 001217.
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Les caisses ont été ouvertes en démontant tout d’abord les woofers. Attention, dans les premiers modèles d’AR3a, dont le nôtre, le mastic noir assurant l’étanchéité du woofer contient de l’amiante. L’amiante s’observe lorsqu’on tranche le mastic avec une palette de peintre ou un couteau : il apparaît à la surface de la coupe sous la forme de petites particules blanches qui, observées à la loupe, sont des petites particules d’amiante non encore complètement complètement débitées en fibres individuelles. En temps normal, la présence d’amiante dans le mastic ne constitue pas un danger puisque les fibres sont engluées dans mastic et que celui-ci reste souple et collant. Mais quand on tranche ou on gratte ce matériau, il vaut mieux être prudent. Donc il convient de travailler très proprement en plein air avec un masque et des gants jetables en évitant de disperser les fragments de mastic restants et en aspirant la boîte après avoir travaillé.
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Quand on retire les woofers, des particules de bois peuvent s’arracher de la surface en bois comprimé sur laquelle le woofer était scellé avec le mastic. Après démontage des woofers et enlèvement du mastic, nous avons peint la surface abîmée avec de la peinture à l’huile noire pour stabiliser les paillettes du panneau de bois comprimé, améliorer la cohésion, fixer les fibres d’amiante éventuellement encore présentes et améliorer l’étanchéité.
Les condensateurs d’origine sont au nombre de trois : un condensateur double de 150 µF et de 50 µF isolés à l’huile (de couleur noire et fixé par les trois brides métalliques) et un condensateur de 6 µF isolé à l’huile (petit boîtier en carton beige).
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Ils ont été a été retirés et remplacés des condensateurs isolés au polyéthylène : un 150 µF Jantzen Audio Cross Cap MKP 400VDC - 5% de tolérance, un 50 µF Solen Fast Cap PPE-MKP-FC 630VDC - 5% de tolérance et un 6.2 µF Jantzen Audio Cross Cap MKP 400VDC - 5% de tolérance. Les voltages élevés (400 et 630VDC) garantissent que les condensateurs puissent encaisser une puissance importante et donc assurer un comportement identique à tous les régimes.
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Les rhéostats d’origine, fortement corrodés, ont été remplacés par des rhéostats de fabrication russe de 15 ohms 25 Watt. Il s’agit de rhéostats de puissance à corps en céramique d’une grande qualité de fabrication (aux standards militaires). L’inscription en Cyrillique sur la boîte signifie : “Made in the USSR, RESISTORS, PPB-25 G, Power 256 t, date 8505 R=15 Om+-10% 1 item”. Les dimensions sont 45 x 35 mm pour le corps et 6 x 35 mm pour l’axe, embase de 10mm et un poids de 130g.
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Ces rhéostats ont été utilisés dans certaines enceintes « high-end » dans les pays de l’Est avant la chute du mur de Berlin. Par exemple, les enceintes S90 fabriquées à Riga par la marque Radiotehnika (dont je possède un exemplaire) (
http://old-fidelity.de/thread-2383.html et
http://audiokarma.org/forums/index.php? ... 394/page-6) et, surtout, les légendaires Elektronika 75 AC065 et 100 AC063, copie high-end des Fisher STE 1200 Studio Standard fabriqués dans les usines de l’industrie militaire soviétique dans les années 80 (
http://old-fidelity.de/thread-2995-page-2.html). Voir aussi
https://inthouse.ru/vintage/speakers/Fi ... 01200.html, que Google Translate peut vous traduire sans problème en français.
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Une fois les rhéostats montés dans les caisses, un capot de protection en carton a été confectionné pour éviter que la laine de verre ne vienne s’introduire dans les parties non protégées du rhéostat (le curseur).
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La protection a été réalisée sous la forme d’une boîte en carton gris épais (le type de carton dont sont faites les boîtes à chaussures, mais en plus épais) qui a l’avantage de ne pas vibrer. La boîte a été collée sur le fond de la caisse à l’aide d’un cordon de colle UHU Hart.
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Les condensateurs ont été fixés à l’aide de clips plastiques pour la fixation de câbles électriques dont seule la partie inférieure a été gardée et dont la base a été percée pour permettre d’utiliser un collier en nylon. Ces clips sont eux-mêmes fixés par vissage sur le fond de la caisse.
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Lors du remontage des woofers, l’étanchéité a été assurée en utilisant le mastic de bourrage en cordon Strip-Caulk 3M (ref : 08578) de couleur noire. Il s’agit d’un mastic de bourrage sous la forme de cordons souples utilisés par les carrossiers pour l’étanchéité des ouvertures internes de la carrosserie. Ce produit reste souple et collant et ne se dessèche pas et, surtout, il n’est pas élastique et ne flue pas. Ces propriétés sont essentielles pour garantir une bonne étanchéité, une absence de vieillissement et la possibilité d’un démontage ultérieur. Il est très proche du produit utilisé à l’origine par Acoustic Research et ne contient pas d’amiante. Nous avons commandé une boîte de Strip-Caulk 3M aux USA (en Europe, la marque 3M ne vend plus que la couleur grise). Attention, par temps chaud, il est conseillé de le laisser au frigo avant de l’utiliser, sinon il s’étire comme du chewing-gum quand on le détache du papier gras. Nous avons également prédécoupé au cutter le papier gras qui sépare les couches successives de cordons, afin que le cordon ne s’étire pas lorsqu’on le détache. Le truc est de détacher d’un mouvement rapide le cordon de sa protection en papier. On obtient ainsi un cordon d’épaisseur constante. Nous en avons mis trois cordons côte à côte en dessous du woofer et deux côte à côte en dessous des tweeters (voir ci-dessous que leur remplacement s'est avéré nécessaire après coup).
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Pour protéger les woofers des particules qui pourraient se détacher de la laine de verre, nous avons utilisé de la gaze médicale (compresses Sterilux ES, Hartmann, 10 x 20cm 12 plis). Cette gaze médicale permet de remplacer le papier Kempax originel (voir photo ci-dessous), qui s’était en partie décomposé.
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près remontage des woofers, nous nous sommes aperçus qu’un des tweeters ne donnait qu’un son anormalement faible et que l’autre grésillait quand un certain volume sonore était atteint.
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Ce problème de dégradation progressive des tweeters des AR3a est bien connu. Il est dû à la dégradation de la mousse polyuréthane de couleur orange qui est utilisée à l’extérieur pour fixer la membrane du tweeter et à l’intérieur pour empêcher les excursions de la bobine mobile du tweeter.
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Nous avons remplacé ces tweeters par des HiVi Q1R (dôme en textile et refroidissement par ferrofluide, bobine mobile en aluminium plaqué par du cuivre) de 15 watts RMS (30 watts max) avec une impédance de 6 ohms, un domaine de fréquences de 2.5 à 20 kHz, une fréquence de résonnance de 1 kHz et un SPL de 89 dB 2.83V/1m. Les dimensions internes et externes ainsi que les positions des vis sont exactement celles des tweeters d’origine. Ces tweeters peuvent être obtenus sur eBay chez Larry Lagace, Vintage AR Parts and Service, USA (vintage-ar). Ils ont été modifiés par ce vendeur pour donner un son identique aux tweeters d’origine. D’une part, une self de 0.07 mH 18 gauge à air en parallèle a été ajoutée et, d’autre part, l’avant du tweeter a été percé pour faire passer les fils (modèle pour connexion externe par l’avant). Ces modifications garantissent que le son soit le plus fidèlement possible à l’image du son fourni par les tweeters originels (son très doux, pas d’agressivité).
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La caisse a été fixée à l’aide de Velcro autocollant à un pied sur roulettes provenant prévu à l’origine pour un DM2A.
Le tissu brun a été remplacé par une toile proche du matériau de départ. Nous avons acheté cette toile sur eBay chez Larry Lagace, Vintage AR Parts and Service (avec une feuille d'instruction pour le montage). Il s’agit d’une toile en lin écru de 18 fils par inch dont les interstices sont ouverts. Ce tissu possède une texture (des fils d’une grosseur inégale sont disposés verticalement).
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Résultat de la remise en état : avec un ampli Atoll IN200 et une platine Marantz CD9005, j’ai un réel plaisir d’écoute et de redécouverte de ma collection de CD, dû à un équilibre spectral, une clarté et un respect des timbres, une précision et une profondeur des basses (peut-être moins colorées que les B&W DM2, que je continue néanmoins à beaucoup apprécier). L’écoute est sans fatigue durant des heures, quel que soit le volume. La paire d’AR3a se trouve depuis maintenant une année dans mon salon. C’est un choix très adapté à la vie en famille, où les goûts sont très variés et où la qualité, le velouté et l'absence de fatigue de la reproduction sonore permettent dans une certaine mesure de faire accepter par les autres membres de la famille ce que chacun met dans le lecteur CD. Pour ma part, j’écoute du jazz, de la bossa-nova, de l’opéra, de la musique de chambre, baroque ou symphonique, de la musique africaine ou arabe. Mon salon est pourvu d’un plafond à 45°, d’une grande mezzanine, d’un tapis de grande taille, de murs garnis de bibliothèques et d’une baie vitrée de 6 m de longueur qui peut être occultée par des tentures lourdes. Idéal, non ?
