Contrefaçon de transistor, exemple du 2SC2240

Transistor 2SC2240
La vie du dépanneur n’est pas de tout repos. Il faut parfois faire des pieds et de mains pour trouver LE composant nécessaire pour réparer la bête malade, et parfois, cela se complique encore…

Si vous naviguez depuis quelques temps sur la mer houleuse du Vintage, vous avez connaissance du fait que de nombreux composants électroniques sont copiés.
L’excellente page de Rod Elliot est une bonne base pour se faire peur.
Sans comprendre l’anglais, les photos présentes sont claires et alarmistes.
De nombreux transistors de puissances (comme le MJ15003 par exemple) sont contrefaits.
La plupart des semi-conducteurs sont atteints par ce fléau, et même si il est facile de se faire prendre, il y a quelques pistes qui permettent de limiter les dégats.

Il n’y a donc pas que les transistors de puissances, habituellement onéreux, qui sont copiés.
Le simple NPN 2SC2240 Toshiba, coutant généralement moins d’un euro (voir moins de 50 centimes) sera l’exemple utilisé dans cet article.

J’ai acheté il y a peu un lot de 2SC2240 dans une boutique online française.
Le but de cet article n’est pas de « pourrir » cette boutique, elle ne sera donc pas citée et son nom ne sera pas non plus communiqué sur demande.

Transistor 2SC2240

Voici trois transistors tirés du lot.
A gauche un transistor « normal », mais au marquage bien différent de celui utilisé par Toshiba.
Au milieu, le marquage n’est même pas présent !
A droite, deux pattes sont soudées entre elles (ils sont neufs je le rappelle).
Aucun des transistors du lot (plusieurs dizaines) n’est fonctionnel.

Transistor 2SC2240

A gauche, deux transistors issus du lot en question.
A droite, un Toshiba original.
Comme on peut le constater à l’ouverture, ces deux transistors n’ont pas grand-chose à voir, il n’ont pas le même layout.
La présomption de contrefaçon est énorme, il ne peut pas simplement s’agir d’un lot de transistors défectueux.

Finalement, j’ai de la chance, ces transistors ne fonctionnent tout simplement pas, un simple test au multimètre permet de les éliminer avant un montage catastrophique …

Transistor 2SC2240

Plus difficile maintenant.
A droite toujours notre transistor original Toshiba. A gauche, issu d’un autre lot plus ancien que le lot présenté plus haut, un 2SC2240 suspicieux.
Plus difficile car le transistor en question réponds bien aux tests basiques (diode).
Il affiche même un gain (hfe) compatible avec la documentation technique du 2SC2240, le petit futé.….

Transistor 2SC2240

Grâce à un appareil bon marché (Transistor tester DY294), je vais tester la tension de claquage (Breakdown Voltage).
Le datasheet du 2SC2240 indique 120v, c’est une valeur minimum, elle est généralement bien plus importante.
Transistor 2SC2240

Résultat du test sur un 2SC2240 original Toshiba : 186v. On est très au dessus des 120v annoncés, et même si le protocole de test est différent, nul doute que nous avons ici un VRAI transistor Toshiba 2SC2240.

Transistor 2SC2240

Résultat du test sur le 2SC2240 suspicieux : 82v. Pas de doute possible, ce transistor ne respecte pas le minimum de 120v de tension de claquage.
Ce transistor est une contrefaçon, dans le meilleur des cas, un remarquage.
Hors de question de monter ce genre de chose dans un appareil quel qu’il soit : poubelle.

Malheureusement, le test proposé ci-dessus n’est parfois pas suffisant pour déceler un transistor contrefait, surtout lorsqu’il s’agit de transistors de puissances To3, les contrefaçons récentes passant ce genre de test avec succès si j’en crois mes lectures.

Bref, comment faire pour ne pas se faire avoir ?
Vous cherchez à acheter des transistors To3 anciens, dont la référence semble introuvable ?
Coup de bol, sur Ebay un vendeur à l’autre bout du monde vous propose l’élu pour quelques euros : laissez tomber.
Le Père Noël n’existe pas. Tout à un prix dans ce bas monde, une référence introuvable sera forcément onéreuse, voir très onéreuse.
Renseignez vous, cherchez sur le web un équivalent moderne, et quand vous l’aurez trouvé, ne l’achetez pas n’importe où, privilégiez une société connue, n’hésitez pas à demander par mail l’origine du transistor, que l’on vous confirme par écrit qu’il s’agit bien d’un transistor original.
S’il est possible d’avoir l’information, privilégiez une société qui commande directement chez le constructeur.

Vous avez toujours un doute après réception ?
Dans le cas d’un boitier To3, contrôlez minutieusement la sérigraphie, elle doit correspondre dans le moindre détail à l’originale (trouvable sur le web). Les numéros présents (autre que la référence) permettent habituellement de contrôler la date de fabrication.
La forme des lettres, la couleur de l’encre, la texture et la finition du boitier, tout a une importance.

Dans le cas d’une restauration demandant un nombre conséquent de transistors To3 de même référence, il peut être utile d’en prendre un de plus (je ne parle pas d’appairage ici, cela est encore un autre problème…) et de le décapsuler pour visualiser l’intérieur (voir la page de Rod Elliot pour les comparaisons).

LA solution existe, permettant un contrôle complet pour peu que l’on ait en sa possession le datasheet du constructeur du transistor : le traceur de courbe (Curve tracer).
C’est très onéreux (pour un appareil complet et performant), mais il permet de vérifier les caractéristiques du composant testé, sous forme de courbe comme son nom l’indique, il permet également un appairage parfait de plusieurs transistors et d’autres petites choses bien sympathiques encore…

Quelques mots clefs à taper dans votre moteur de recherche favori :
« Counterfeit transistor », « fake transistor », « copy transistor »

Cet article a 7 commentaires

  1. vince

    Merci pour l’article!
    Je viens de découvrir le « Transistor tester DY294 » est-ce que ce testeur permet de savoir à coup sur si un transistor est HS ?

    Cordialement

  2. Avatar photo
    Audiovintage

    Oui bien sur, mais un simple multimètre avec une position test diode et hfe en ferait autant.
    Néanmoins, on parle bien de transistor HS, dans le cas d’un transistor « fuyant », (exemple un 2SC458 qui crachote) aucun des deux appareils cités ne vous sera utile…

  3. pisani

    bonjour
    ou acheter des Toshiba 2SC2240 ou équivalent
    c’est pour remplacer des C458 d’un ampli
    merci
    cdlt
    jl

  4. Avatar photo
    Audiovintage

    Les 2SC2240 Toshiba ne sont plus fabriqués, il faudra donc chercher de vieux stocks (je n’ai pas d’adresse à vous donner). On peut trouver des 2SC2240 d’autres constructeurs, comme cdil (Continental Device India). On ne peut pas considérer ces transistors comme des contrefaçons, mais sont-ils réellement identiques en tout point aux Toshiba originaux ? Je ne peux vous le certifier, je n’en utilise pas.
    Les 2SC458 peuvent être remplacés par divers transistors aux caractéristiques plus ou moins différentes, cela dépend des appareils, de la position de ces transistors etc etc..
    Cordialement.

  5. LeGuyader

    Bonjour
    Merci pour votre article.
    Pour ma part, dans un ampli Marantz PM42 (2 transistors et 4 résistance HS) , je vais remplacer un 2SC2240 par un 2N5551 (brochage différent, moins de gain, plus de bruit) acheté chez SQR.
    Je serai étonné que ça ne fasse pas l’affaire (sauf pour un mélomane exigeant.)
    Cordialement
    Laurent

  6. Avatar photo
    Audiovintage

    Bonjour Laurent.
    Nous n’avons pas tous les deux la même problématique. Vous souhaitez faire revivre un appareil qui vous appartient, sans trop galérer à trouver les composants originaux ou des équivalents modernes pas forcément économiques à acheter en faible quantité, et bien sur, à un tarif raisonnable. Et c’est tout à votre honneur !

    De mon côté, je dois rendre des appareils à mes clients avec la garantie qu’il n’y a aucun doute ni sur le choix des références des composants employés, ni sur leurs provenance et il faut que ces appareils passent sans souci les mesures et et les écoutes. Les factures émises portent mon nom et j’apprécierai moyennement que l’on puisse m’associer à l’utilisation de composants contrefaits ou choisis par facilité plutôt que par choix technique.
    Cela complique bien évidemment énormément la tache pour de nombreux appareils (voir même impossible pour certains), et penser que mes interventions se limitent à ce qui est rapporté dans mes comptes rendus serait donc une erreur.

    Les 2SC2240 (et donc les 2SA970) Toshiba (des vrais), que ce soit des GR ou des BL sont encore trouvables mais l’époque ou ils coûtaient 20 centimes est clairement révolue ! (je ne divulgue pas mes sources et je ne revends pas de composants).
    Ceci explique aussi le fait que je stock plusieurs milliers de transistors obsolètes divers et variés dans l’optique de pouvoir réparer encore pendant longtemps nos « vieux machins » 🙂
    Mais il ne faut pas rêver, si pour certaines machines, une réparation dans les règles de l’art était encore possible il y a 10 ans, ce n’est plus le cas aujourd’hui, et le nombre de ces machines va se multiplier dans le futur…

    Thierry.

  7. Marc

    Bonjour et un grand merci pour tous ces articles aussi intéressants qu’instructifs .
    Je suis obligé de bien confirmer qu’il devient très difficile de trouver des bons composants, voire même des composants tout court…….
    Pour ma part je restore des magnétophones à bande ou à cassettes. Je suis actuellement sur un Revox PR99. Et bien même pour ce qui est de trouver un simple condensateur de 1uF de qualité éprouvée c’est la galère. Obligé de se fournir sur plusieurs sites, et encore, parfois certaines valeurs semblent ne plus être fabriquées. Je ne parle pas des transistors…..
    On regrette bien l’époque où les blackgate et les Philips étaient fournis en abondance et à des prix corrects.
    Bien cordialement
    Marc

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