1979
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78 était soleil, 79 est brume et nuit.
Les bras de l’étang nous ont rejetés au début de l’hiver. A temps pour voir les premiers flocons de neige descendre du ciel sur la ville.
Comment savoir le temps qui passe, l’aiguille qui joue à chat sur l'horloge, le battement inexorable du cœur vers demain ?
Que faut-il bâtir dans l’âge que l’on pioche, que l’on sculpte à coup de désirs et de gestes, attablés à la pendule des questions et des rêves ?
Dis, le temps, où se trouve-t-il ?
Au confins d'un pays lointain, aux chants d'une révolution qui s'éveille, au partage d'une main qui cherche la tienne ?
Chercher le temps, qui s'enfuit , nuage au ciel venté,
Le temps, se terre-t-il au creux de l’heure qui s’éteint, au rebord de la fenêtre de tes yeux, au souvenir d'un temps étreint ?
Le temps ne boit-il pas les fleuves de nos mémoires ?
En souvenir d'heureux futurs, t'en souviens tu ?
De toi à moi, dans l'instant de ces années qui nous séparent, dans l'instant d'hier, la mémoire de demain: J'attends. J’attends la morsure d'un autre instant.
1979, premières morsures de futurs "grands".
L'Angleterre explose de musiques.
Joe Jackson sortira deux albums en cette année. Ses deux meilleurs ? Peut-être, ou pas, on s'en fout, ces deux là secouent la grisaille.
Look Sharp! sorti le 4 janvier
I'm the Man sorti le 5 octobre

Quelque chose que l'on appelera New Wave commence à balbutier.
Premier Simple Minds (qu'est-ce que ça a mal vieilli ..) et aussi 1er Cure.
The Cure - Three Imaginary Boys, avec la reprise de Foxy Lady d'Hendrix.
Et le premier The Undertones, 1er album, pour ses chansons courtes, pour la voix de Feargal Sharkey.

Des étincelles d'énergie, ça pétille de partout.
Pendant ce temps Elvis Costello sort Armed Forces, son deuxième album, et le talent se confirme.
En France, Téléphone publie "Crache ton venin" pour mon anniversaire, et Renaud sort un peu de l'anonymat avec son 3ème disque.
Et puis, le très regretté Olive et son Lili Drop nous font voyager dans Paris avec "Sur ma Mob"
( A la basse, chez Lili Drop, il y a Korin, qui deviendra plus tard Enzo Enzo, )

1979, les radios ne sont pas encore "Libres", mais la ville vibre de toutes parts.
Ces années sont des années sans sommeil, le jour je bosse, la nuit, ce sont les arrières salles des bistrots avec les groupes, les coulisses et les loges du théâtre de Lille; les concerts, je les vis le plus souvent derrière la scène.
Quand je rentre à l'appartement, il est rare qu'il soit vide, nous sommes presque les seuls à ne pas vivre dans des chambres (universitaires ou de ville) alors l'appartement est devenu un lieu d'hébergement et de rencontres parfois improbables.
Mes yeux tombent, la nuit se carambole, je n’ai plus que l’écrin des mots pour envelopper la peau fripée des souvenirs.
Une ville, une rue, les trottoirs froissés d’idées brumeuses. Au coin de la rue ton sourire m’oublie.
Mais 1979 aura été aussi l'année de quelques grands frissons musicaux.

Le premier Pretenders évidemment, pour la belle Chrissie Hynde.
Un disque qui vous emporte des les premières secondes de Precious, cette voix et ces guitares.. et cette voix..
et comment résister à Brass in Pocket..
Un autre disque, mais là, le disque en lui même est très inégal, comme tous ceux du Fleetwood Mac de cette époque. Un double album nommé Tusk.
Ce disque, pour les trop rares chansons chantées par la belle Stevie Nicks.
Parce que la voix de Stevie Nicks me fait craquer, définitivement.
Et puis, sans doute, l'album de cette année 79, magnifique de la première à la dernière seconde.
Et encore une fois une superbe voix féminine.
Rickie Lee Jones.
Trente ans plus tard, ce disque me procure toujours autant de frissons à chaque écoute.
Chuck E's In Love
Il en reste un dernier, enfin un dernier pour moi, un dernier pour cet article car bien sûr beaucoup d'autres disques auraient pu être cités, non un dernier qui fait partie de ce que j'appelle mes disques de hasard.
Un nouveau magasin de disques avait ouvert à Lille, "Caroline", un magasin avec pas mal d'import, et c'est là que j'ai entendu ce Stealin Home de Ian Matthews.
Ian Matthews est loin d'être un inconnu, puisqu'il est un des fondateurs de Fairport Convention. Il a même participé à un duo appelé "Hi Fi" !
Mais ses disques solo n'ont connu qu'un succès d'estime.
Et pourtant ce Stealin Home est pour moi un disque parfait. Si les platines vinyl, platine cd etc… avaient une mémoire, elles vous diraient sans doute que sur ces trente dernières années, Stealin Home est un des cinq albums que j'ai le plus écouté.
Et parce que cette vidéo m'amuse:
1979 se terminera en apothéose avec un des plus grands disques de l'histoire du Rock, mais comme il est sorti fin décembre 79, j'en parlerai pour l'année 1980.
Quel disque.. ?
The Clash London Calling.
A vous, pour cette année et vos souvenirs.
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